L’église de Frontenay-Rohan-Rohan, dédiée à Saint-Pierre, occupe une position stratégique : surélevée, juste au centre du bourg, elle veille sur la commune depuis des siècles. Elle n’est pas seulement un lieu de culte ; c’est aussi un témoin de l’histoire locale, marquant de son empreinte les évolutions et les soubresauts de la région. Sa silhouette domine la vallée, visible depuis les rues principales comme depuis les chemins du marais tout proche.
L’histoire de l’édifice commence au Moyen Âge, vraisemblablement au XII siècle, période marquée par le développement du bourg fortifié de Frontenay. Comme souvent dans le Bas-Poitou, la première église en pierre se construit à la faveur de l’expansion démographique et de la présence d'importantes familles seigneuriales.
Le sanctuaire roman est alors plus modeste qu’actuellement. Les vestiges du chevet originel et la base du clocher, visibles sur les murs nord et sud, sont des preuves archéologiques de cet état ancien, même si l’église a été plusieurs fois reconstruite.
Les XVI et XVII siècles sont agités pour Frontenay-Rohan-Rohan. La région subit de plein fouet les Guerres de Religion. L’église Saint-Pierre, à la foi catholique solidement ancrée dans une zone de passage entre Niort et le Marais poitevin, devient un véritable enjeu stratégique.
Une anecdote locale rapporte qu’à cette époque, les habitants fortifient le sanctuaire, utilisant l’église comme refuge en cas de raid. Le chevet et une partie des murs sont alors renforcés, en mêlant grosses pierres calcaires, moellons et quelques éléments récupérés sur la forteresse voisine, aujourd’hui disparue.
C’est au XIX siècle que l’église Saint-Pierre prend sa silhouette actuelle, bien connue des Frontenaysiens. Sous le Second Empire, l’abbé Armand Bernard obtient l’appui du Maire et d’une souscription publique pour agrandir et rénover la vieille église, qui menace alors ruine.
La campagne de travaux s’achève en 1863. Selon le registre communal, l’inauguration rassemble plus de 1 200 personnes, soit la quasi-totalité du bourg et des hameaux, une affluence exceptionnelle pour l’époque.
Un détail marquant : sous les dalles de la nef subsistent plusieurs tombes de notables, dont celle de Charles Foucher, maire de Frontenay et fondateur de la bibliothèque communale au XIX siècle (source : Amis du Vieux Frontenay).
L’église Saint-Pierre n’a pas seulement été spectatrice de l’histoire : elle s’inscrit dans le quotidien des habitants. Jusqu’à la loi de séparation de l’Église et de l’État en 1905, tous les grands événements étaient marqués là : baptêmes, obsèques, mariages, mais aussi les rassemblements civiques, comme lors de la Révolution française, où l’édifice fut, un temps, transformé en « temple de la Raison ».
L’église reste aujourd’hui un point de ralliement, accueillant régulièrement des concerts, des expositions de crèches ou de fleurs, perpétuant son rôle au cœur de la vie locale.
L’église de Frontenay-Rohan-Rohan offre un double visage : à la fois monument incontournable pour comprendre le passé du Marais poitevin et lieu vivant, au cœur de la communauté. Qu'on soit amateur d'histoire ou simple curieux, entrer dans cet édifice, c’est parcourir près de 900 ans de mémoire locale, vibrer encore un peu à l’unisson des générations passées et présentes.
En venant la découvrir, chacun peut s’imprégner d’un pan de l’histoire poitevine, mais aussi repérer tous les détails qui font de Saint-Pierre un jalon unique du patrimoine de Frontenay-Rohan-Rohan.